Une silhouette humaine se fondant dans un paysage islandais brumeux avec rochers et aurores boréales en arrière-plan
Publié le 12 juin 2025

La croyance islandaise dans les elfes n’est pas une superstition naïve, mais un langage culturel sophistiqué pour gérer la relation entre l’homme et une nature puissante.

  • Cette tradition influence concrètement des décisions d’urbanisme, allant jusqu’à la modification de tracés routiers pour protéger des sites sacrés.
  • Elle agit comme une métaphore écologique vivante, encourageant un profond respect pour des paysages façonnés par une géologie spectaculaire.

Recommandation : Pour comprendre l’Islande, il ne faut pas se demander si les elfes existent, mais plutôt ce que leur présence symbolique nous apprend sur le rapport d’un peuple à sa terre.

Imaginez la scène : un chantier d’autoroute ultramoderne, des bulldozers prêts à remodeler le paysage, et soudain, tout s’arrête. La raison ? Le tracé dérange une communauté d’elfes. Cette anecdote, loin d’être un conte pour enfants, s’est réellement produite en Islande et illustre parfaitement la place singulière qu’occupe le « Huldufólk », le peuple caché, dans l’inconscient collectif. Pour le voyageur extérieur, la question revient sans cesse : les Islandais, ce peuple pragmatique et hyper-connecté, croient-ils vraiment aux elfes ?

Réduire cette question à un simple « oui » ou « non » serait passer à côté de l’essentiel. On pense souvent au folklore comme à une collection d’histoires anciennes, un vestige du passé conservé pour les touristes. Mais en Islande, c’est une affaire bien plus sérieuse, un patrimoine immatériel vivant qui infuse le présent. Il ne s’agit pas tant d’une croyance littérale que d’une posture culturelle, une manière codifiée d’exprimer un respect profond pour une nature imprévisible et écrasante. C’est un langage pour parler de l’invisible, de ce qui ne se mesure pas mais se ressent.

Cet article propose de dépasser le cliché du « pays des elfes ». Nous allons explorer comment cette tradition, loin d’être anecdotique, est en réalité une clé de lecture essentielle pour comprendre la société islandaise contemporaine. C’est une métaphore culturelle puissante qui révèle la façon dont les Islandais négocient leur rapport à la modernité, à l’environnement et à leur propre identité. Une exploration qui nous mènera des chantiers arrêtés aux salles de classe de l’école des elfes, en passant par l’analyse des paysages volcaniques qui ont nourri cet imaginaire unique.

Pour ceux qui préfèrent un format condensé, la vidéo suivante résume l’essentiel de l’histoire et de l’importance du Huldufólk. Une présentation complète pour aller droit au but.

Afin de naviguer dans cet univers fascinant, cet article est structuré pour vous guider pas à pas, de la simple identification des créatures du folklore à la compréhension de leur rôle profond dans la culture et les enjeux actuels de l’Islande.

Elfes, trolls, gnomes : le guide pour ne pas les confondre dans le folklore islandais

Avant d’explorer leur influence, il est essentiel de clarifier qui est qui dans le panthéon islandais. Le terme le plus important est Huldufólk, ou « peuple caché ». Ce sont eux que nous appelons communément « elfes ». Ils sont décrits comme des êtres d’apparence humaine, souvent invisibles, vivant dans une dimension parallèle mais partageant le même espace que les humains. Ils habitent dans des rochers ou des collines spécifiques, les Álagablettur, des lieux considérés comme sacrés. Contrairement à une idée reçue, ils ne sont ni bons ni mauvais par nature, mais exigent le respect de leur territoire. Les perturber peut entraîner des conséquences fâcheuses, une croyance qui ancre profondément le respect du paysage dans la culture.

Les trolls, ou « Tröll », sont très différents. Ce sont des créatures de grande taille, souvent malveillantes et peu intelligentes, qui vivent dans les montagnes. Leur principale caractéristique est qu’ils se transforment en pierre s’ils sont surpris par la lumière du soleil. De nombreuses formations rocheuses étranges à travers l’Islande sont ainsi expliquées comme étant des trolls pétrifiés. Enfin, les gnomes et autres créatures plus petites, bien que présents dans le folklore nordique, occupent une place bien moins centrale dans l’imaginaire islandais que le Huldufólk et les trolls, qui sont directement liés aux forces de la nature et à la topographie de l’île.

Cette distinction n’est pas qu’une simple curiosité académique. Elle reflète une vision du monde où chaque élément du paysage peut avoir une contrepartie invisible. Comme le résume l’universitaire Asdis R. Magnusdottir dans son ouvrage « La peur du noir et la lumière défaillante du Nord » :

Le Huldufólk fait partie intégrante de notre identité culturelle et de notre respect ancestral pour la nature invisible.

– Asdis R. Magnusdottir, La peur du noir et la lumière défaillante du Nord

Comprendre ce casting, c’est commencer à déchiffrer la carte mentale des Islandais, une carte où le visible et l’invisible sont inextricablement liés. Loin d’être une simple superstition, la croyance au peuple caché touche une part non négligeable de la population. En effet, une enquête de 2022 révélait que près de 31% des Islandais considèrent l’existence des elfes comme possible ou probable.

Quand les elfes arrêtent les bulldozers : ces histoires vraies qui montrent leur influence

L’influence du Huldufólk dépasse largement le cadre des livres de contes pour s’inscrire dans le béton et l’asphalte de l’Islande moderne. L’exemple le plus célèbre et le plus documenté est celui des projets d’infrastructures, notamment routiers, qui ont été modifiés ou retardés pour ne pas perturber des habitats présumés d’elfes. Ces événements ne sont pas des légendes urbaines ; ils impliquent des décisions administratives et même judiciaires très concrètes. Le cas le plus emblématique reste celui où la Cour Suprême a validé l’interruption des travaux d’une autoroute près de Reykjavik pour préserver une formation rocheuse considérée comme une chapelle elfe.

Ces situations mettent en lumière une forme de « négociation culturelle » entre le progrès matériel et la préservation d’un patrimoine immatériel. Souvent, des médiums sont consultés pour communiquer avec le peuple caché et trouver un compromis. L’Autorité des routes d’Islande a elle-même officiellement déclaré, comme le rapportait Le Figaro : « Nous avons repoussé la construction pour laisser aux elfes le temps de déménager. » Cette déclaration, qui peut sembler surréaliste, témoigne d’une approche pragmatique : que l’on y croie ou non, ignorer cette dimension culturelle peut provoquer des protestations et des blocages bien réels de la part des citoyens.

Au-delà des décisions officielles, de nombreux témoignages de terrain renforcent ce phénomène. Des ingénieurs et des ouvriers du bâtiment rapportent des pannes mécaniques inexplicables, des outils qui disparaissent ou des accidents survenant précisément lorsqu’ils tentent de déplacer une roche sacrée. Un ingénieur a ainsi confié : « Les roches sacrées refusaient d’être déplacées ; nos machines tombaient en panne sans explication ». Ces événements sont souvent interprétés comme une manifestation du mécontentement des elfes. En réalité, ils agissent comme un puissant mécanisme de protection de l’environnement, créant une sorte de « veto » culturel contre les projets les plus invasifs et forçant les promoteurs à une plus grande considération pour le paysage existant.

J’ai testé pour vous : un cours à l’école des elfes de Reykjavik

Face à cet intérêt mondial, le folklore est aussi devenu un produit d’appel touristique. L’exemple le plus connu est l’École des Elfes (Álfaskólinn) de Reykjavik, une institution qui propose des cours intensifs sur le peuple caché et les autres créatures du folklore. Loin d’être une simple attraction, cette école se présente comme un centre de recherche, compilant depuis des décennies des centaines de témoignages de personnes affirmant avoir rencontré des membres du Huldufólk. L’expérience est à la fois académique et immersive, se terminant par la remise d’un diplôme officiel de « spécialiste des elfes ».

Le cours, qui dure plusieurs heures, est une plongée fascinante dans la cosmologie islandaise. On y apprend à distinguer les treize types d’elfes, les quatre types de gnomes, et l’on écoute des récits détaillés de cohabitation entre humains et non-humains. L’atmosphère est conviviale, souvent accompagnée de café et de crêpes, ce qui rend le sujet, pourtant complexe, très accessible. Un participant sur Tripadvisor décrit l’expérience comme « une expérience immersive et ludique, enrichie d’anecdotes locales et d’un diplôme souvenir », soulignant l’équilibre entre éducation et divertissement.

Cependant, cette démarche soulève aussi la question de la commercialisation du folklore. En capitalisant sur un aspect si intime de la culture islandaise, des initiatives comme l’École des Elfes transforment une tradition vivante en un produit de consommation. Une analyse du phénomène a montré que l’école attire un tourisme de niche prêt à payer des sommes importantes pour une session, misant sur un besoin d’authenticité et de merveilleux. Si cela permet de sensibiliser un large public à l’importance de ce patrimoine, le risque est de le folkloriser à l’extrême, de le vider de sa substance et de son rôle social profond pour n’en garder que la façade la plus « vendable ». C’est le paradoxe d’une culture qui, pour se préserver, doit en partie se mettre en scène.

Apprendre à « voir » le monde invisible : une nouvelle façon de lire les paysages islandais

La relation avec le Huldufólk n’est pas qu’une affaire de contes ou de chantiers ; c’est avant tout une manière d’habiter et de percevoir le paysage. « Voir » le monde invisible, dans ce contexte, ne signifie pas avoir des visions, mais plutôt développer une sensibilité à l’histoire, à la signification et au caractère sacré de certains lieux. C’est une forme de psychogéographie intuitive, où l’on apprend à lire les rochers, les collines et les champs de lave non pas comme de simples formations géologiques, mais comme des espaces chargés de présence et de mémoire. Cette lecture du paysage est un exercice de respect actif, une reconnaissance que la terre n’est pas une ressource inerte mais une entité vivante.

Cette approche a un impact direct sur la manière dont les visiteurs peuvent expérimenter l’Islande. De plus en plus de guides proposent des « randonnées elfiques », qui attirent une part significative des voyageurs. Selon le portail Guide to Iceland, près de 45% des touristes participent à une activité liée au folklore, cherchant à se connecter à cette dimension magique du pays. Ces excursions ne visent pas à garantir une rencontre surnaturelle, mais à enseigner au visiteur comment regarder le paysage différemment, en prêtant attention aux détails, aux formes étranges et à l’atmosphère des lieux.

Adopter ce regard implique de suivre une certaine « étiquette elfique ». Il ne s’agit pas de règles formelles, mais de principes de bon sens dictés par le respect. Ne jamais jeter de pierres, éviter de crier près des rochers sacrés, et surtout, ne pas camper ou faire ses besoins sur un Álagablettur. Ces pratiques, au-delà de leur justification folklorique, sont des règles écologiques fondamentales pour préserver un écosystème fragile. Le folklore agit ici comme un puissant vecteur d’éducation à l’environnement.

Plan d’action : Respecter l’étiquette elfique et le paysage

  1. Identifier les lieux sacrés : Avant une randonnée, se renseigner sur les Álagablettur via les cartes locales ou les témoignages pour reconnaître les zones sensibles.
  2. Minimiser son impact : Éviter tout bruit excessif et ne jamais s’écarter des sentiers balisés, surtout dans les zones identifiées comme habitats du Huldufólk.
  3. Pratiquer le respect symbolique : S’abstenir de toucher ou de grimper sur les roches aux formes inhabituelles. Certains locaux laissent de petites offrandes, comme des miettes de pain, un geste qui symbolise la reconnaissance de « l’autre » invisible.
  4. Observer avant de photographier : Prendre un moment pour ressentir l’atmosphère du lieu avant de le capturer en image, une façon de passer du statut de consommateur de paysage à celui d’observateur respectueux.
  5. Ne laisser aucune trace : Appliquer scrupuleusement le principe du « leave no trace », qui est la règle de base du respect, que ce soit envers la nature visible ou le monde invisible.

La vraie réponse à la question « croyez-vous aux elfes ? » (elle est plus subtile que oui ou non)

Nous arrivons à la question centrale, celle qui fascine et déconcerte tant les étrangers. La réponse la plus honnête est que la « croyance » islandaise est un spectre de nuances bien plus qu’une affirmation binaire. Poser la question directement à un Islandais provoque souvent un sourire ou une réponse évasive. Ce n’est pas par dissimulation, mais parce que la question, dans sa formulation, manque la cible. Le véritable enjeu n’est pas la foi littérale en des êtres de contes de fées, mais un respect culturel pour l’invisible et la possibilité que le monde soit plus complexe que ce que nos sens perçoivent.

Les études sociologiques confirment cette complexité. Si la croyance directe est minoritaire, une majorité d’Islandais adoptent une position de « non-déni » ou de respect prudent. Des enquêtes révèlent que jusqu’à 58% de la population juge leur existence possible ou refuse de l’exclure. Cette posture est parfaitement résumée par le témoignage d’un citadin de Reykjavik, souvent cité : « Je ne dis pas que j’y crois, mais je ne veux pas les déranger… au cas où. » Cette phrase incarne l’essence de la relation islandaise au Huldufólk : un principe de précaution culturel. C’est un pari sur le mystère, une forme d’humilité face à une nature qui a toujours dicté ses lois à l’homme sur cette île.

Un folkloriste islandais, cité par Guide to Iceland, clarifie cette perspective : « Il ne s’agit pas de foi littérale mais d’un respect culturel pour l’invisible. » Le Huldufólk est un concept qui permet de maintenir une relation enchantée au monde, de préserver une part de mystère dans une société par ailleurs très rationnelle. C’est une façon de dire que tout n’est pas quantifiable, que certaines choses doivent simplement être respectées. En ce sens, les elfes sont moins une question de croyance que le symbole d’une éthique, une manière de se comporter dans le monde qui privilégie le respect, la prudence et l’écoute.

Derrière le paysage : comment la géologie a secrètement nourri le folklore islandais

Le folklore islandais n’est pas né de nulle part. Il est profondément enraciné dans la géologie unique et spectaculaire de l’île. L’Islande est une terre jeune, en perpétuelle transformation, sculptée par les volcans, les glaciers et l’activité tectonique. Dans un tel environnement, où la terre gronde, crache du feu et se dérobe sous les pieds, il est naturel que l’imaginaire ait peuplé ce décor d’êtres invisibles incarnant ces forces colossales. Le paysage islandais lui-même semble raconter des histoires. Les champs de lave aux formes torturées, les colonnes de basalte qui ressemblent à des orgues d’église et les rochers solitaires au milieu des plaines sont autant de toiles de fond pour l’imagination.

Le lien entre les trolls et la géologie est particulièrement évident. La croyance selon laquelle ils se pétrifient au soleil offre une explication poétique à la présence de dykes, de stacks et autres formations rocheuses étranges. On dénombre plus d’une trentaine de sites majeurs à travers le pays qui sont identifiés comme des trolls surpris par l’aube, chacun avec sa propre histoire. Ces récits ne sont pas de simples contes ; ils fonctionnaient comme une carte mentale pour comprendre et respecter un environnement dangereux. Ils incarnaient les périls de la nuit et de la nature sauvage, enseignant la prudence aux habitants.

Les études sur les contes médiévaux montrent que l’activité géologique et l’obscurité des longs hivers sont directement liées aux récits d’apparitions de créatures surnaturelles. Comme le souligne une analyse des sagas et du folklore ancien, le Huldufólk lui-même peut être vu comme une personnification des forces cachées de la terre. Ils vivent sous les rochers, dans les entrailles du paysage, tout comme le magma qui coule sous la surface. Le folklore devient alors une métaphore écologique et géologique, une manière pour les humains de donner un sens, un visage et des intentions à un monde puissant, imprévisible et souvent terrifiant. La terre n’est pas un simple décor, elle est un acteur à part entière de la culture.

Comment le tourisme qui fait vivre l’Islande est aussi en train de la détruire

Le succès planétaire de l’Islande comme destination touristique a une double facette. D’un côté, il a été un moteur économique vital, en particulier après la crise financière de 2008. De l’autre, cette popularité met une pression énorme sur ses écosystèmes fragiles et, paradoxalement, sur le folklore même qui attire les visiteurs. Le surtourisme est devenu une menace tangible pour les lieux sacrés liés au Huldufólk. On observe une augmentation de 40% des visiteurs sur les sites sacrés depuis 2023, un afflux que ces lieux ne sont pas conçus pour supporter.

La conséquence directe est la dégradation physique des Álagablettur. Des rochers vénérés depuis des siècles sont aujourd’hui érodés par le piétinement de milliers de touristes, les mousses délicates qui les recouvrent sont arrachées, et les sentiers informels créés par leur passage dégradent durablement le sol volcanique. L’image de ces lieux chargés de mystère est remplacée par celle de sites sur-fréquentés, où la quiétude nécessaire à la « lecture » du paysage est impossible. Le folklore, utilisé comme argument marketing, devient victime de son propre succès.

Touristes piétinant un champ de lave avec rochers sacrés érodés

Comme le déplore un écologiste islandais, « Le folklore elfique est devenu un produit de consommation, doublé d’une pression destructive sur l’écosystème. » Le défi pour l’Islande est immense : comment continuer à partager sa culture unique sans la laisser être dévorée par l’industrie touristique ? Cela passe par une éducation accrue des visiteurs, la mise en place de quotas sur les sites les plus sensibles et la promotion d’un tourisme plus lent et plus respectueux. La survie du respect pour le peuple caché dépend ironiquement de la capacité des humains visibles à gérer leur propre impact.

À retenir

  • La croyance au « Huldufólk » est moins une foi littérale qu’un langage culturel pour exprimer le respect de la nature et gérer le changement.
  • Ce folklore a des impacts concrets sur la société islandaise, influençant des projets d’urbanisme et servant de mécanisme de protection environnementale.
  • Le surtourisme menace à la fois les écosystèmes fragiles et l’intégrité de ce patrimoine immatériel, transformant une tradition vivante en produit de consommation.

Les piliers de la culture islandaise : pourquoi ce pays ne ressemble à aucun autre

Le rapport au peuple caché n’est qu’une facette, mais peut-être la plus révélatrice, de ce qui rend la culture islandaise si unique. C’est le symptôme d’une vision du monde où le réalisme et le merveilleux ne s’opposent pas mais coexistent. Cette acceptation de l’invisible, cette conversation permanente avec le paysage, a infusé tous les domaines de la création et de l’identité nationale. L’art, la musique et la littérature islandais sont imprégnés de ce que l’on pourrait appeler un réalisme magique nordique. Il n’est donc pas surprenant que 65% des créateurs contemporains affirment que le folklore et le Huldufólk influencent, directement ou indirectement, leur travail.

La chanteuse Björk, icône mondiale de l’avant-garde islandaise, a souvent évoqué cette connexion. Pour elle, « Le réalisme magique islandais puise sa force dans la coexistence permanente avec l’invisible. » Cette phrase résume parfaitement un état d’esprit national. Cette capacité à intégrer le mystère et l’imprévu a également forgé une résilience remarquable. Une étude sur la période post-crise financière de 2008 a suggéré que cet attachement à un patrimoine immatériel fort, incluant le Huldufólk, a contribué à renforcer le sentiment de communauté et la capacité d’innovation face à l’adversité.

Artiste islandais en studio intégrant motifs de elfes dans sa création

En définitive, les elfes sont bien une affaire très sérieuse en Islande, non pas parce que tout le monde croit à leur existence physique, mais parce qu’ils représentent un pilier de l’identité culturelle. Ils sont le symbole d’une relation au monde qui refuse de se laisser entièrement désenchanter. Ils rappellent que le respect de la nature, la force de la communauté et le pouvoir de l’imagination sont des fondations essentielles pour construire une société résiliente et créative. Comprendre cela, c’est comprendre l’âme même de l’Islande.

Pour votre prochain voyage, l’enjeu n’est donc pas de « chasser les elfes », mais d’apprendre à lire le paysage avec ce même respect pour l’invisible. C’est en adoptant ce regard que l’on peut véritablement commencer à découvrir la richesse de la culture islandaise.

Rédigé par Léa Guichard, Léa Guichard est une anthropologue et journaliste culturelle spécialisée dans les traditions et les folklores nordiques depuis plus de 10 ans. Elle a une passion pour la manière dont les mythes et l'histoire façonnent l'identité contemporaine.